Anton Maertens, porte-parole de BC materials, membre du Cercle, nous explique comment les matériaux de construction circulaires peuvent répondre à la problématique de la pollution dans le secteur de la construction. Entre apprentissage en dehors de nos frontières et passion pour un bâti respectueux de l’environnement, découvrez leur contribution à l’économie circulaire.
Quel est le point de départ de votre projet ?
Le secteur de la construction est très important pour l’économie parce qu’il génère beaucoup d’emplois, mais peu de personnes réalisent qu’il est probablement l’un des plus polluants au monde. Il constitue près de 30 % de la pollution de l’air, 30 % des émissions de CO2 et 40% de l’extraction des matières premières brutes. Avec BC materials, nous avons constaté qu’il est possible de construire autrement, en travaillant avec ces mêmes matières premières. Nous utilisons les terres excavées lors de chantiers de construction, et ensuite, nous les transformons en matériaux de construction : enduits de terre, pisés et briques de terre. De cette manière, nous mettons un terme au gaspillage des ressources, car ces terres sont fréquemment considérées comme des déchets. De plus, ces ressources sont parfois transportées très loin, dans des carrières en Wallonie, aux Pays Bas, ou même en Allemagne. Selon nos calculs, ce transport coûte déjà 37 millions d’euros par an, et là, rien n’est encore construit. Face aux défis environnementaux actuels, et avec cette pollution, les produits de terre crue que nous développons sont très utiles, voire indispensables.
Comment vous est venue cette idée ?
Spécialisés en transformation et construction circulaire, les fondateurs de BC materials sont des architectes ayant appris cette méthode particulière au Burundi lorsqu’ils ont construit une bibliothèque en terre crue avec la population locale. Encore étudiants à cette époque, ils ont constaté qu’il était presque impossible d’utiliser des briques cuites parce qu’il fallait abattre beaucoup d’arbres – ce qui est d’ailleurs mauvais pour la biodiversité, pour l’air, … C’est pour cette raison qu’ils ont cherché une solution à ce problème. Un entrepreneur local leur a indiqué qu’il était possible de construire aisément avec les briques de terre crue. Cette expérience leur a été fondamentale, essentielle et transformatrice. Ils se sont dès lors demandés si cette technique pouvait être adaptée à la Belgique. En réalité, ils se sont rendus compte que cette méthode existait déjà avant la révolution industrielle. À l’heure actuelle, la transition ne se fait que lentement dans ce secteur en raison des habitudes liées à certaines pratiques et à certains produits tels que le béton. Mais on voit avec BC materials qu’on peut avoir un effet transformatif dans ce domaine : nous sommes actuellement les premiers dans l’Union Européenne à être opérationnel dans la revalorisation de terres excavées en matériaux de construction.
BC materials est-il parvenu à faire bouger les lignes en matière de construction ?
Les fondateurs ont osé lancer ce projet ambitieux dans un secteur aux habitudes bien ancrées! Nous avons également reçu le support de la région bruxelloise grâce à l’appel à projet « Be Circular » ainsi que la reconnaissance du Fonds SE’nSE en tant que lauréat 2019 à travers un prêt subordonné convertible. Nous sommes parvenus à intéresser de nombreuses personnes issues du gouvernement, des investisseurs privés, des entreprises ou encore des fonds. Nous accordons aussi beaucoup de valeur au réseau ainsi qu’à l’expertise et au feedback que nos différents interlocuteurs peuvent nous apporter.

BC materials cherche-t-il à être un modèle, à sensibiliser les personnes à cette nouvelle pratique ?
Oui, il y a beaucoup de « fans » qui souhaitent construire autrement et qui suivent notre développement de très près. Par ailleurs, nos fondateurs donnent des cours dans plusieurs universités et nous organisons des workshops avec des étudiants en architecture, des entrepreneurs ou des personnes issues du monde de la construction qui sont curieuses de voir comment notre méthode fonctionne. Cette activité est enthousiasmante, elle est agréable et facile à réaliser, on s’amuse beaucoup! De plus, c’est une manière de donner de l’oxygène à ce marché qui est encore petit. Nous essayons de les inspirer. Lors d’un workshop, nous nous sommes rendus compte – en discutant avec un étudiant de 5ème année – que dans les cours d’architecture, la construction circulaire, les énergies renouvelables et l’impact environnemental n’étaient abordés que très tardivement. Il y a un véritable problème de sensibilisation. Or, il faut que ce secteur s’adapte et change certaines de ses méthodes. Aux Pays-Bas, par exemple, dans la construction, il y a déjà une « crise» liée à l’azote. Un juge a décidé qu’on ne pouvait plus émettre d’azote pour l’instant parce qu’ils ont dépassé plusieurs fois et sur plusieurs années leur quota d’émissions. Ce scénario pourrait très bien se produire en Belgique aussi et nous n’en avons pas encore conscience.
Quelle est votre plus-value en matière d’économie circulaire ?
Dès le départ, nous voulions travailler avec des matières circulaires. Après 20, 30 ou encore 50 ans, les matériaux que nous utilisons peuvent être récupérés, réutilisés sans qu’ils ne perdent jamais leur valeur qualitative. On peut facilement employer nos produits pour une autre construction car tout se récupère, sans pour autant avoir besoin d’énergie fossile ou de processus chimique. En outre, en combination avec le bois et la paille, leur masse thermique est très intéressante. Nos matériaux peuvent facilement retenir la chaleur pendant l’été – il fait plus frais – et restituer la chaleur pendant l’hiver. Construire de cette manière permet de mieux s’adapter aux défis climatiques actuels puisque nous travaillons avec des produits naturels à la base. Enfin, pour transformer la terre, nous utilisons une compression hydraulique, ce qui ne requiert pas une énergie immense et ne produit pas d’émissions, c’est presque manuel. À titre d’exemple, lors de nos interactions avec le bureau d’architecture BC Architects and Studies, nous avons, à chaque fois, comme perspective comment construire d’une belle manière et avec l’impact le moins lourd, voire même le plus positif pour l’environnement. Dans la Région de Bruxelles-Capitale, BC materials opère à Tour & Taxis dans une infrastructure fixe et protégée afin de fabriquer des produits prêts à l’emploi, mais la start-up offre également un service sur mesure en se déplaçant sur chantier pour une production in situ dans le reste de la Belgique. De ce fait, l’infrastructure et la logistique de BC materials restent toujours proche des ressources, minimisant ainsi au maximum les transports.

Quelle(s) solution(s) souhaitez-vous apporter aux entreprises ?
On est une des rares entreprises qui offrent des matériaux circulaires à l’origine – alors que la plupart du temps, ils sont considérés comme des déchets – et à destination, parce qu’ils sont réutilisables à l’infini. Pour les briques de terre crue, nous réfléchissons à une production à plus grande échelle et à une éventuelle collaboration avec un partenaire industriel. Cela nous permettrait également de diminuer nos prix car, pour l’instant, la brique de terre pressée est plus chère que la brique cuite. Si ce partenariat a lieu, il sera facilement envisageable que ce soit sans énergie fossile. On veut aussi prendre en compte la réduction des transports pour diminuer les émissions de C02, l’approche locale a aussi toute son importance dans notre modèle. Si nous concrétisons cette idée, il serait absurde d’exporter nos terres aux Pays-Bas, en Allemagne, ou en France. C’est pourquoi ce serait, peut-être, une possibilité de travailler avec un label dans d’autres villes européennes pour que notre modèle soit reproduit avec des terres locales.
Services
- Transformation des terres d'excavation
- Production de matériaux locaux : enduits de terre ; blocs de terre compressée ; terre à piser
- Workshops & formations
Avantages
- Matériaux circulaires
- Neutres en carbone
- Confort climatique & environnement sain
- Consommation d'énergie grise minimale
- Transport réduit au strict minimum
Où ?
- Halle de production à Bruxelles
- Travail in situ grâce à leur unité de production mobile & flexible
Contactez-le de la part du Cercle : anton@bcmaterials.org 📌
Article rédigé par : Mariel Engels
Correction et relecture : Sébastien Lewy